Quelles sont les révélations du corpus en ce qui concerne l’ordre et le statut des religieuses représentées ? Quelles sont les congrégations privilégiées ? Qui des fondatrices, des supérieures ou des simples moniales bénéficient du plus grand nombre d’images ?
Les congrégations de bénédictines et de cisterciennes à l’époque moderne
Parmi les bénédictines, on retrouve :
- les bénédictines traditionnelles.
- les fontevristes, bénédictines suivant les coutumes et la règle de l’abbaye de Fontevraud.
- les bénédictines de l’Adoration perpétuelle du Saint-Sacrement, congrégation fondée au XVIIe siècle par Catherine de Bar.
- les bénédictines de Notre-Dame du Calvaire ou calvairiennes, congrégation fondée au XVIIe siècle par Antoinette d’Orléans-Longueville.
- les bénédictines de la Paix-Notre-Dame, bénédictines du Nord de la France issues d’une réforme menée par Florence de Werquignoeul, à l’extrême fin du XVIe siècle.
- les bénédictines anglaises en France, en exil après la dissolution des monastères de Grande-Bretagne dès le XVIe siècle[1].
Parmi les cisterciennes, on distingue :
- les cisterciennes traditionnelles.
- les feuillantines, branche féminine des feuillants, créées à la fin du XVIe siècle par Marguerite de Polastron et Jacqueline de Dimptale.
- les cisterciennes d’inspiration trappiste, cherchant à se placer sous le patronage de l’abbaye de la Trappe et de l’abbé Armand Jean Le Bouthillier de Rancé au XVIIe siècle.
- les bernardines de Saint-Bernard ou de la Divine Providence, cisterciennes réformées sous la double impulsion de Louise de Ponsonnas et de Louise Blanche Thérèse de Ballon au XVIIe siècle.
- les bernardines du Précieux Sang, issues de la précédente réforme, sous la direction de Madeleine Thérèse Baudet de Beauregard, qui n’ont jamais fondé d’autre couvent que celui de Paris au XVIIe siècle.
Les bénédictines majoritaires dans l’iconographie
Les représentations de bénédictines dépassent de beaucoup les représentations de cisterciennes. Les bénédictines concernent 64,5% du corpus, soit une large majorité. Les cisterciennes représentent seulement 26,9% du total, un pourcentage peu élevé, n’englobant qu’un peu plus du quart des représentations.
Cela s’explique par de très nombreuses représentations de sainte Scholastique, la sœur de saint Benoît, fondatrice traditionnelle des moniales bénédictines. Les représentations de bénédictines saintes médiévales sont également très importantes en nombre. Certaines figures mobilisent une imagerie fournie. Or, les cisterciennes n’ont pas de figures fondatrices aussi charismatiques. Cependant, les cisterciennes bénéficient de la riche iconographie développée autour de l’abbaye de Port-Royal des Champs.
Recouvrant un pourcentage marginal de 8,5% du total, les représentations de religieuses « non identifiées » concernent souvent des représentations allégoriques ou caricaturales, notamment les gravures révolutionnaires des décennies 1780-1790.
Les résultats sont dominés par les bénédictines traditionnelles. Du fait du prestige de leur abbaye-mère et du haut rang de leurs abbesses, les fontevristes se distinguent aussi. Les nouvelles congrégations issues de la période moderne ne peuvent pas rivaliser. Seules les figures des fondatrices de ces congrégations sont traitées iconographiquement.
Le constat est le même en ce qui concerne les cisterciennes. Les cisterciennes traditionnelles représentent la majorité des représentations, un chiffre soutenu par la nombreuse iconographie suscitée par l’abbaye de Port-Royal des Champs et par les portraits d’abbesses de communautés cisterciennes traditionnelles. Les réformes ou congrégations modernes sont très peu représentées.
Répartition des représentations par ordre religieux[2]
Ordre religieux |
Nombre de représentations |
Bénédictines |
758 |
Cisterciennes |
317 |
Non identifié |
100 |
Total |
1175 |
Répartition des représentations selon les congrégations de religieuses bénédictines
|
Nombre de représentations |
Religieuses bénédictines dont : |
768 |
- Bénédictines traditionnelles |
619 |
- Fontevristes |
87 |
- Bénédictines de l’Adoration perpétuelle du Saint-Sacrement |
26 |
- Bénédictines de Notre-Dame du Calvaire |
22 |
- Bénédictines de la Paix-Notre-Dame |
7 |
- Bénédictines anglaises en France |
7 |
Répartition des représentations selon les congrégations de religieuses cisterciennes
Nombre de représentations | |
Religieuses cisterciennes dont : |
321 |
- Cisterciennes traditionnelles | 298 |
- Cisterciennes feuillantines | 14 |
- Cisterciennes d’inspiration trappiste | 3 |
- Bernardines de Saint-Bernard ou de la Divine Providence | 6 |
- Bernardines du Précieux Sang | 0 |
Le groupe des supérieures, abbesses et prieures, surreprésenté
Les représentations de supérieures composent environ 38,7% du total, soit plus d’un tiers. C’est le groupe le plus important numériquement. Les portraits sont bien plus nombreux que les représentations en groupe. Il y a environ 34,9% de représentations de simples moniales, soit un peu plus d’un tiers. Ce sont alors les représentations en groupes qui prédominent nettement sur les représentations individuelles. Les représentations de fondatrices constituent environ 26,2% du total, soit un quart. Elles sont le groupe le plus faible en nombre. Le nombre de représentations de fondatrices seules dépasse celui des représentations en groupe. De nombreuses images présentent plusieurs catégories, par exemple, une abbesse et ses religieuses ou encore une fondatrice avec une supérieure.
Le groupe des supérieures rassemble à la fois les abbesses et les prieures, donc l’ensemble des supérieures de communautés. Le groupe des simples moniales est constitué des moniales professes mais aussi converses et novices. Le groupe des fondatrices est composé de plusieurs types de personnalités :
- Sainte Scholastique, sœur de saint Benoît et fondatrice traditionnelle des moniales bénédictines.
- Les fondatrices religieuses médiévales de monastères prestigieux. Elles sont toutes saintes. Il s’agit de sainte Berthe d’Avenay, sainte Opportune d’Almenèches, sainte Radegonde de Poitiers, sainte Fare de Faremoutiers, sainte Odile d’Alsace, sainte Salaberge de Laon, sainte Ombeline, sainte Rictrude de Marchiennes, sainte Dode de Reims, sainte Godeberthe de Noyon.
- Les fondatrices laïques de monastères : Mathilde de Garlande, la reine Blanche de Castille, Elisabeth de Montmorency, la reine sainte Bathilde.
- Les fondatrices de congrégations modernes de religieuses bénédictines ou cisterciennes : Antoinette d’Orléans-Longueville, Catherine de Bar, Florence de Werquignoeul, sœur Gertrude More, Marguerite de Polastron, Louise de Ponsonnas, Louise Blanche Thérèse de Ballon.
Répartition des représentations par statut des religieuses représentées
|
Fondatrice |
Supérieure |
Simple moniale |
Seule |
218 |
303 |
131 |
En groupe |
127 |
207 |
329 |
Total |
345 |
510 |
460 |
[1]- C’est le roi Henri VIII d’Angleterre qui met en place la dissolution des monastères de son royaume dès 1538. Le but officiel est de lutter contre les abus du clergé régulier, considéré comme trop puissant et trop débauché. La raison officieuse est de récupérer les revenus et terres des monastères au profit de la Couronne.
[2]- Lorsque l’on ne dispose pas d’assez d’éléments pour affirmer une appartenance de la ou des religieuses représentées aux bénédictines ou aux cisterciennes, la représentation est classée comme « Non identifié ». Certains comptes-doubles peuvent apparaitre du fait de la spécificité de certaines religieuses. En outre, une même image peut contenir plusieurs représentations de religieuses différentes.