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l’art et le protestantisme à l’époque moderne

Focus sur …  l’art et le protestantisme à l’époque moderne

 

Le recours aux images est fortement critiqué au XVIe siècle. L’image est donc l’une des préoccupations des pères conciliaires qui ne manquent pas de légiférer sur ce point contesté par les protestants. Tandis que ceux-ci proscrivent la majorité des images religieuses car elles inciteraient à l’idolâtrie, l’Eglise catholique réaffirme leur utilité. 

La législation conciliaire sur l’image et ses usages

En 1563, la 25e session du concile de Trente précise : « Le Saint Concile défend que l’on place dans les églises aucune image qui s’inspire d’un dogme erroné et qui puisse égarer les simples, il veut qu’on évite toute impureté, qu’on ne donne pas aux images des attraits provocants. Pour assurer le respect de ces décisions, le Saint Concile défend de placer en aucun lieu, et même dans les églises qui ne sont pas assujetties à la visite de l’ordinaire, aucune image insolite, à moins que l’évêque ne l’ait approuvé. ». L’usage des images est « légitime » car « par le moyen de l’histoire des mystères de notre rédemption représentés par des peintures ou par d’autres moyens semblables, le peuple est instruit et affermi dans les articles de foi, qu’il doit se rappeler et vénérer assidûment. ». La représentation iconographique des miracles et des saints entraine les fidèles à conformer « leur vie et leurs mœurs à l’imitation des saints » et « à adorer et aimer Dieu et à cultiver la piété ». Enfin, le concile de Trente ordonne la suppression de « toute superstition dans l’invocation des saints, dans la vénération des reliques ou dans un usage sacré des images »[1].    

L’Eglise catholique proscrit les nudités. La décence devient le caractère essentiel de l’art religieux. Les artistes doivent traiter les personnages et les scènes avec respect, sans décor et artifices inutiles. L’artiste doit donner de la noblesse aux personnages évangéliques. De plus, le concile de Trente condamne les œuvres qui propagent un dogme erroné. L’art religieux qu’aime l’Eglise catholique est un art sévère, où rien n’est inutile ; l’attention du spectateur ne doit pas être détournée de la méditation des mystères du salut. Comme l’analyse Emile Mâle, c’est la grandeur de l’Evangile qui mérite d’émouvoir, pas la beauté de la nature[2]. L’Eglise catholique mise sur l’aménagement intérieur et l’image extérieure des églises pour favoriser l’émotion, pour proposer des modèles de saints et de saintes, pour contrer les protestants. La multiplication des peintures et sculptures s’efforce de traduire l’illumination intérieure, la conversion subite des grands saints, qui a vertu d’exemples pour les fidèles[3].

L’image mobilisée dans la lutte contre le protestantisme

La lutte contre le protestantisme fut « la pensée de tous les instants » de l’Eglise catholique pendant un siècle et demi. L’image est d’autant plus chère aux catholiques qu’elle est menacée par l’iconoclasme protestant. Celui-ci touche les représentations figurées des saints et des personnes divines. Le protestantisme détruit les images et proscrit l’art religieux. La pauvreté volontaire, le dépouillement du temple protestant s’oppose aux églises catholiques sur-ornées de tableaux, fresques, et matériaux précieux. L’art religieux du XVIIe siècle lutte contre le protestantisme : l’Eglise façonne l’art à son image. Les artistes doivent être en parfaite harmonie avec la pensée religieuse de leur temps. Ils sont donc les fidèles interprètes de la Contre-Réforme[4].

 


[1]- Décret sur l’invocation, la vénération et les reliques des saints et sur les saintes images, session 25 du 3-4 décembre 1563.

[2]- Emile MALE, L'Art religieux après le Concile de Trente, étude sur l'iconographie de la fin du XVIe, du XVIIe et du XVIIIe siècles en Italie, en France, en Espagne et en Flandre, Paris, Armand Colin, 1932, p. 1-7.

[3]- Sur l’art de la période tridentine : Olivier CHRISTIN, « Expressions de la piété et de la foi dans les arts plastiques (1530-1630) », dans Marc VENARD et André VAUCHEZ, dir., Histoire du Christianisme, Paris, Desclée, 1992, p. 1143-1162.

[4]- Emile MALE, L'Art religieux après le Concile de Trente, étude sur l'iconographie de la fin du XVIe, du XVIIe et du XVIIIe siècles en Italie, en France, en Espagne et en Flandre, Paris, Armand Colin, 1932, p. 9 et p. 15.